Nombre de salariés expérimentent en ce moment le télétravail à plein temps en plus du confinement. Une organisation inédite qui pose question quant aux risques psychosociaux. Les travailleurs peuvent se retrouver isolés, angoissés par le contexte, surchargés de travail ou au contraire désœuvrés, avec de grosses difficultés à concilier travail et vie familiale… L’Anact délivre quelques pistes de prévention. Et des études sont en cours sur cette situation inédite.
Il y a quelques mois, la Dares estimait que 7 % des salariés télétravaillent de façon régulière ou occasionnelle. C’était avant le coronavirus. Depuis mi-mars, le confinement a bouleversé les organisations de travail : l’estimation est pour l’instant très vague, mais près d’un tiers des salariés seraient aujourd’hui en télétravail total – ce qui pourrait coller, une fois exclus les salariés arrêtés ou en chômage partiel, avec les chiffres du ministère du travail qui estime que 4 emplois sur 10 peuvent être exécutés en télétravail. Une chose est sûre : pour la plupart de ces télétravailleurs, c’est une première. .
Les recommandations habituelles sur le télétravail pour prévenir les situations à risque sur le plan psychosocial préconisent un télétravail partiel ainsi qu’un accompagnement des salariés. Car le télétravail demande un apprentissage. Ces préconisations n’ont pu être respectées par les entreprises dans un contexte d’urgence sanitaire. Les employeurs restent cependant tenus d’évaluer et de prévenir les risques des nouvelles conditions de travail de leurs salariés.
Attention aux situations d’isolement
« Il est très important dans le contexte actuel – qui va au-delà du télétravail, à cause des mesures de confinement – que les salariés ne se retrouvent pas en situation d’isolement », pointe Assia Milan, chargée de mission à l’Aract Normandie et spécialiste du télétravail. Pour éviter cet isolement, plusieurs pistes sont proposées par le réseau Anact-Aract : réunions courtes et régulières en visioconférence pour faire le point sur l’activité, utilisation d’outils de messagerie instantanée, temps de convivialité virtuels comme des pauses-café en ligne…
Afin d’outiller les entreprises et de permettre l’échange de bonnes pratiques, l’Anact a organisé le 31 mars un premier webinaire gratuit sur le sujet. D’autres sont programmés dans les prochains jours.
Contacter régulièrement les salariés
Assia Milan souligne le rôle clé des manageurs et des RH dans l’organisation de ce télétravail de crise. « Il est nécessaire de contacter régulièrement les salariés, notamment ceux qui risquent d’être en difficulté comme les personnes seules ou les salariés n’ayant aucune pratique de télétravail, afin de favoriser les remontées d’informations et les ajustements », ajoute-t-elle.
En cas de détection de signaux de souffrance, il peut être conseillé d’orienter les salariés vers des cellules d’écoute proposées par certains services de santé au travail ou des cabinets spécialisés. Mais attention, prévient Assia Milan, « le recours à une cellule d’écoute ne doit pas remplacer la mise en place de mesures de prévention des RPS ».
Réguler la charge de travail
Les managers doivent aussi réguler la charge de travail de leurs des collaborateurs, en faisant régulièrement le point avec eux. Il s’agit de prévenir la surcharge de travail et la sur-sollicitation de certains salariés. Mais aussi la sous-charge et l’isolement d’autres salariés du fait de l’arrêt de certains projets. Ce management à distance nécessite aussi des temps collectifs afin de redéfinir les objectifs et les moyens.
« On ne peut attendre des mêmes niveaux de productivité compte-tenu du contexte », souligne la chargée de mission de l’Aract Normandie. Pour beaucoup, se posent des problèmes de conciliation des temps entre vie professionnelle et vie hors-travail : certains doivent répondre aux sollicitations de leurs enfants confinés, préparer les repas, voire s’occuper d’un proche malade, puisque les cas d’infection covid-19 se multiplient.
Pour faciliter cette articulation, il est recommandé d’identifier les marges de manœuvre possibles dans la fixation des horaires de travail en intégrant les contraintes personnelles des salariés.